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quelques villes de la Syrie. « Vous vous trompez, répliqua le modeste Persan, le roi des rois, le maître du monde, regarde avec mépris de si misérables acquisitions ; et des dix nations subjuguées par ses armées invincibles, les Romains lui paraissent les moins formidables[1]. » Selon les Orientaux, l’empire de Nushirwan s’étendait de Ferganah dans la Transoxiane, à l’Yémen ou Arabie Heureuse. Il subjugua les rebelles de l’Hyrcanie ; réduisit les provinces de Cabul et de Zablestan, situées sur les bords de l’Indus ; détruisit la puissance des Euthalites ; termina par un traité honorable la guerre contre les Turcs, et admit la fille du grand khan au nombre de ses épouses légitimes. Victorieux et respecté de tous les princes de l’Asie, il donna audience dans son palais de Madain ou Ctésiphon aux ambassadeurs du monde. Ils déposèrent humblement au pied de son trône, comme dons ou comme tribut, des armes, de riches vêtemens, des pierreries, des esclaves ou des aromates, et il daigna accepter du roi de l’Inde dix quintaux de bois d’aloès, une fille esclave haute de sept coudées, et un tapis plus doux que la soie, formé, dit-on, de la peau d’un serpent d’une espèce extraordinaire[2].

  1. Procope (Persic., l. II, c. 10, 13, 26, 27, 28 ; Goth., l. II, c. 11, 15), Agathias (l. IV, p. 141, 142) et Ménandre (in Excerpt. legat., p. 132-147) développent fort au long les négociations et les traités entre Justinien et Chosroès. Consultez aussi Barbeyrac, Hist. des anciens Traités, t. II, p. 154, 181-184, 193-200.
  2. D’Herbelot, Bibl. orient., p. 680, 681, 294, 295.