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guer la province d’Yémen ou l’Arabie Heureuse[1], terre éloignée qui produit l’encens et la myrrhe, et qui avait échappé plutôt qu’elle n’avait résisté aux vainqueurs de l’Orient. Après la défaite d’Abrahah, sous les murs de la Mecque, la discorde de ses fils et de ses frères facilita l’invasion des Perses : ils poussèrent au-delà de la mer Rouge les étrangers établis dans l’Abyssinie ; et un prince du pays et de la race des anciens Homérites fut remis sur le trône en qualité de vassal ou de vice-roi de Nushirwan[2]. Le neveu de Justinien déclara qu’il vengerait les injures qu’avait reçues son allié chrétien le prince d’Abyssinie : elles lui fournirent un prétexte décent pour cesser le tribut annuel, mal déguisé sous le titre de pension. L’esprit intolérant des mages opprimait les églises de la Persarménie ; elles invoquèrent en secret le

  1. L’indépendance générale des Arabes, qu’on ne peut admettre sans beaucoup de restrictions, est soutenue aveuglément dans une dissertation particulière des auteurs de l’Histoire universelle, t. XX, p. 196-250. Ils supposent qu’un miracle continuel a maintenu la prophétie en faveur des fils d’Ismaël ; et ces dévots savans ne craignent pas de compromettre la vérité du christianisme en l’appuyant sur cette base fragile et glissante.
  2. D’Herbelot, Biblioth. orient., p. 477 ; Pococke, Specimen Hist. Arabum, p. 64. 65. Le père Pagi (Critica, t. II, p. 646) a prouvé qu’après dix ans de paix, la guerre de Perse, qui avait duré vingt ans, recommença A. D. 571. Mahomet était né A. D. 569, l’année de l’éléphant ou de la défaite d’Abrahah (Gagnier, Vie de Mahomet, t. I, p. 89, 90, 98), et selon ce calcul, deux années furent employées à la conquête de l’Yémen.