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sonne et la propriété des sujets. Selon l’étrange jurisprudence de ces temps-là, le crime du sang pouvait être racheté par une amende ; au reste, le prix de neuf cents pièces d’or exigées pour le meurtre d’un simple citoyen, est une preuve de l’importance qu’on attachait à la vie d’un homme. On calculait avec des soins scrupuleux et presque ridicules les injures moins graves, une blessure, une fracture, un coup ou un mot insultant, et le législateur favorisait l’ignoble usage de renoncer, pour de l’argent, à l’honneur et à la vengeance. L’ignorance des Lombards, soit avant, soit après leur conversion au christianisme, faisait chez eux du crime de sorcellerie un objet de croyance absolu et de haine générale. Cependant les législateurs du dix-septième siècle auraient pu trouver leur devoir et leur condamnation dans les sages lois de Rotharis, qui, tournant en dérision des superstitions absurdes, protégeait les malheureuses victimes de la cruauté populaire ou juridique[1]. On trouve de même dans Luitprand des idées de législation supérieures à celles de son siècle et de son pays ; car il condamnait, en la tolérant, la coupable mais trop ancienne coutume des duels[2] ; et il observait,

  1. Voyez les lois de Rotharis, no 379, p. 47. Striga désigne une sorcière. Ce mot est de la latinité la plus pure. (Horace, Epod. V, 20 ; Pétrone, c. 134.) Un passage de ce dernier auteur, Quæ striges comederunt nervos tuos ? semble prouver que ce préjugé était né en Italie plutôt que chez les Barbares.
  2. Quia incerti sumus de judicio Dei, et multos audivi-