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jamais à l’oreille de son souverain[1] ; et quelques fautes semblent placer Maurice au-dessous de son prédécesseur, dont la vertu fut si pure. Son maintien froid et réservé pouvait être attribué à l’arrogance, sa justice n’était pas toujours exempte de cruauté, sa clémence de faiblesse, et son économie rigoureuse l’exposa trop souvent au reproche d’avarice ; mais les vœux raisonnables d’un monarque absolu doivent tendre au bonheur du peuple. Maurice était doué du discernement et du courage nécessaires pour les accomplir, et son administration fut dirigée par les principes et l’exemple de Tibère. La pusillanimité des Grecs avait établi une séparation si absolue entre les fonctions de roi et celles de général, qu’un soldat arrivé à la pourpre par son mérite, se montrait rarement ou ne se montrait jamais à la tête de ses armées ; cependant l’empereur Maurice eut la gloire de rétablir le roi de Perse sur le trône : ses lieutenans firent contre les Avares du Danube une guerre dont les succès furent douteux, et il jeta un œil de compassion, d’inutile compassion, sur l’abjection et la détresse de ses provinces d’Italie.

Misère et détresse de l’Italie.

L’Italie exposait continuellement sa misère aux

  1. Αυτοκρατωρ οντως γενομενος την μεν οχλοκρατειαν των παθων εκ της οικειας εξενηλατησε ψυκης : αρισ‌τοκρατειαν δε εν τοις εαυτο‌υ λογισμοις κατασ‌τησαμενος. Évagrius composa son histoire la douzième année du règne de Maurice, et il avait été si sagement indiscret, que l’empereur connut et récompensa ses opinions (l. VI, c. 24).