Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 8.djvu/312

Cette page a été validée par deux contributeurs.

sortir de l’urne un nombre suffisant ; ils prêtaient serment de demeurer intègres. La manière d’opiner assurait leur indépendance : le droit de récusation accordé à l’accusé ou à l’accusateur écartait le soupçon de partialité ; et lors du jugement de Milon, la récusation de quinze juges par chacune des parties réduisit à cinquante-un le nombre des voix ou tablettes dont les unes absolvaient l’accusé, les autres le condamnaient, et d’autres enfin présumaient son innocence[1]. 3o. Le préteur de Rome exerçait une juridiction civile ; et, en cette qualité, il était vraiment juge et presque législateur ; mais dès qu’il avait déterminé la nature de l’action, il se donnait souvent un délégué qu’il chargeait de la décision du fait. Le nombre des actions juridiques augmenta, et le tribunal des centumvirs qu’il présidait, acquit plus de crédit et plus de réputation ; mais soit qu’il agît seul ou de l’avis de ses conseils, il y avait peu de danger à revêtir des pouvoirs les plus absolus un magistrat que le peuple choisissait chaque année. Les règles et les précautions établies par la liberté, ont demandé quelques détails : le système du despotisme est simple et inanimé. Avant le siècle de Justinien ou peut-être de Dioclétien, les décuries des juges de Rome n’offraient plus qu’un vain titre : on pouvait

  1. Nous devons ce fait intéressant à un fragment d’Asconius Pedianus, qui vivait sous le règne de Tibère. La perte de ses Commentaires sur les Oraisons de Cicéron nous a privé d’un fonds précieux de connaissances historiques ou relatives aux lois.