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portait ses richesses dans une nouvelle famille, laissant au pouvoir de son premier époux et abandonnant à ses soins un grand nombre d’enfans, qui peut-être n’étaient pas de lui : une femme reçue vierge et belle se trouvait, à l’époque de sa vieillesse, rejetée dans le monde, sans ressources et sans amis ; mais lorsque Auguste pressa les Romains de se marier, leur répugnance prouva assez que les lois établies alors sur les mariages étaient moins favorables aux hommes : cette expérience si libre et si complète des Romains démontre, malgré de spécieuses théories, que la liberté du divorce ne contribue pas au bonheur et à la vertu. La facilité des séparations détruit la confiance mutuelle, aigrit les disputes les plus minutieuses. Il y a si peu de différence alors entre un mari et un étranger ; cette différence peut être si facilement détruite, qu’elle sera encore plus facilement oubliée ; et la matrone qui en cinq années peut se soumettre aux embrassemens de huit maris, doit avoir perdu tout respect pour elle-même et pour la chasteté[1].

  1.   — Sic fiunt octo mariti
    Quinque per autumnos.

        Juven., Satir. VI, 20.

    Quoique cette succession soit bien rapide, toutefois elle est croyable, ainsi que le non consulum numero ; sed maritorum annos suos computant de Sénèque (De beneficiis, III, 16). Saint Jérôme vit à Rome un mari qui enterrait sa vingt-unième femme, laquelle avait enterré vingt-deux de ses prédécesseurs, moins robustes que lui (Opp., tom. I, p. 90, ad Gerontiam). Mais les dix maris en un mois du