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aux derniers philosophes de la Grèce. Son avarice fut prouvée plus clairement et eut des suites plus funestes. S’il se laissa corrompre par des présens dans l’administration de la justice, on se souviendra encore de Bacon. Si Tribonien dégrada la pureté de son état, et s’il publia, modifia ou révoqua des lois par des vues d’intérêt particulier, son mérite ne peut expier sa bassesse. Lors de la sédition de Constantinople, on accorda son éloignement aux clameurs, et peut-être à la juste indignation du peuple, mais on le rappela bientôt après ; et, depuis cette époque jusqu’à sa mort, c’est-à-dire durant plus de vingt ans, il jouit de la faveur et de la confiance de l’empereur. Sa soumission passive et respectueuse a été honorée des éloges de Justinien lui-même, trop vain pour apercevoir à quelles grossières flatteries descendait quelquefois cette soumission. Tribonien adorait les vertus de son gracieux maître ; et regardant la terre comme indigne d’un tel prince, témoignait une pieuse frayeur de voir un jour Justinien, comme Élie ou Romulus, enlevé au milieu des airs et transporté vivant dans les régions de la gloire éternelle[1].

  1. Cette histoire est racontée par Hesychius (De viris illustribus), par Procope (Anecdot., c. 13) et par Suidas (t. III, p. 501). Une telle flatterie est-elle incroyable ?

        — Nihil est quod credere de se
    Non potest, cum laudatur diis æqua potestas.


    Fontenelle (l. I, p. 32-39) a tourné en ridicule l’impudence du modeste Virgile. Le même Fontenelle cependant place son roi au-dessus du divin Auguste ; et le sage Boileau n’a