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présentait à l’assemblée du peuple la corde au cou ; si la loi était rejetée, on étranglait sur-le-champ le novateur.

Lois du peuple.

Les décemvirs avaient été nommés dans une assemblée des centuries, où la fortune avait prévalu sur le nombre : la même chose eut lieu pour l’approbation de leurs Tables. La première classe des Romains, composée de ceux qui possédaient deux cent mille marcs de cuivre[1], se trouva avoir quatre-vingt-dix-huit voix, et il n’en restait que quatre-vingt-quinze aux six classes inférieures, que l’arti-

  1. Denis, Arbuthnot et la plupart des modernes (si on en excepte Eisenschmidt, De Ponderibus, etc., p. 137-140) évaluent les cent mille asses à dix mille drachmes attiques, ou un peu plus de trois cents livres sterl. Mais leur calcul ne peut s’appliquer qu’aux derniers temps, lorsque l’as n’était plus qu’un vingt-quatrième de son ancien poids ; et je ne puis croire que dans les premiers siècles de la république, malgré la rareté des métaux précieux, une once d’argent ait valu soixante-dix livres de cuivre ou d’airain. Il est plus simple et plus raisonnable d’évaluer le cuivre à son taux actuel ; et quand on aura comparé le prix de la monnaie et le prix du marché, la livre romaine et la livre avoir du poids, on trouvera que l’as primitif ou une livre de cuivre, peut être évalué à un schelling d’Angleterre ; qu’ainsi les cent mille asses de la première classe valaient cinq mille livres sterling. Il résultera des mêmes calculs qu’un bœuf se vendait à Rome cinq livres sterling, un mouton dix schellings, et un quarter de blé trente schellings. (Festus, p. 330, édit. Dacier ; Pline, Hist. nat., XVIII, 4.) Je ne vois aucune raison de ne pas admettre les conséquences qui modèrent nos idées sur la pauvreté des premiers Romains.