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Leur caractère et leur influence.

Quoi qu’il en soit de l’origine ou du mérite des Douze-Tables[1], les Romains leur accordèrent ce respect aveugle et partial dont les jurisconsultes de tous les pays se plaisent à entourer les institutions de leur patrie. Cicéron[2] recommande de les étudier comme également agréables et instructives. « Elles amusent, dit-il, par les souvenirs de l’ancien langage et le tableau des anciennes mœurs ; on y trouve les principes les plus sains de morale et de gouvernement ; et je ne crains pas d’affirmer que dans cet ouvrage abrégé des décemvirs se trouve plus de valeur réelle que dans tous les livres de la philosophie grecque. » « Que la sagesse de nos ancêtres est admirable ! ajoute-t-il avec un enthousiasme ou véritable ou feint ; nous excellons seuls dans la législation, et notre supériorité paraîtra bien plus frappante, si nous daignons jeter les yeux sur la jurisprudence grossière et presque ridicule de Dracon, de Solon et de Lycurgue. » Les Douze-Tables furent confiées à la mémoire des jeunes gens et à la méditation des vieillards ; elles furent copiées et développées avec soin par des hommes instruits : elles avaient échappé à l’incendie allumé par les Gaulois ; elles subsistaient au temps de Justinien ; elles se sont

  1. Βραχεως και απεριττως ; tel est l’éloge qu’en fait Diodore (t. I, l. XII, p. 494), et qu’on peut traduire par l’eleganti atque absolutâ brevitate verborum d’Aulu-Gelle. (Noct. Att., XXI, I.)
  2. Écoutez Cicéron (De legibus, II, 23) et celui qu’il fait parler, Crassus (De oratore I, 43, 44).