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prendre, et ses faibles prérogatives tiraient leur plus grande force de l’influence que lui donnait sa libéralité ; mais les nobles indépendans et avides abolirent insensiblement cette sorte de vassalité, et usurpèrent la propriété héréditaire des bénéfices[1]. Cette révolution fut avantageuse à l’agriculture, qui avait été négligée par des maîtres incertains de la durée de leur jouissance[2]. Indépendamment de ces bénéfices royaux, une grande partie des terres de la Gaule étaient divisées en saliques et allodiales, les unes et les autres exemptes de tout tribut ; les terres saliques se partageaient en portions égales entre les descendans mâles des Francs[3].

Usurpations particulières.

Durant les discordes sanglantes et ensuite dans le tranquille déclin de la race mérovingienne, un nouvel ordre de tyrans parut dans les provinces : sous la

  1. D’après un passage de la loi des Bourguignons (t. I, no 4, tom. IV, p. 257), il est évident qu’un fils qui s’en montrait digne, pouvait espérer de conserver les terres que son père tenait de la libéralité de Gondebaut. Il y a lieu de croire que les Bourguignons s’attachèrent à maintenir ce privilége, et que leur exemple encouragea les bénéficiers de France.
  2. L’abbé de Mably a soigneusement établi les différentes révolutions des fiefs et des bénéfices, et sa distinction des temps lui donne à cet égard une supériorité à laquelle Montesquieu lui-même n’a point atteint.
  3. Voyez la loi Salique, tit. 62, t. IV, p. 156. L’origine et la nature de ces terres saliques, parfaitement connues dans les temps d’ignorance, embarrassent aujourd’hui nos critiques les plus instruits et les plus intelligens.