Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 7.djvu/303

Cette page a été validée par deux contributeurs.

marquée seulement par le carnage et la dévastation, continua à séparer les deux empires. Anastase, voulant prévenir le retour de ces malheurs, résolut de fonder une nouvelle colonie si forte, qu’elle fût en état de braver la puissance des Perses, et de la prolonger si loin vers l’Assyrie, que la garnison pût mettre la province à couvert, en faisant du pays ennemi le théâtre de la guerre. [Fortifications de Dara.]D’après ce dessein, il peupla et embellit la ville de Dara[1], située à quatorze milles de Nisibis et à quatre journées du Tibre. Justinien perfectionna les ouvrages élevés à la hâte sous le règne d’Anastase ; et sans nous arrêter sur des places moins importantes, les fortifications de Dara peuvent nous donner une idée de l’architecture militaire de ce siècle. La place était environnée de deux murs, et les cinquante pas d’intervalle de l’un à l’autre offraient une retraite au bétail des assiégés. On admirait la force et la beauté du mur intérieur ; il s’élevait à soixante pieds, et les tours avaient cent pieds de hauteur. Les meurtrières, par où la garnison jetait des armes de trait sur l’ennemi, étaient petites, mais nombreuses ; les soldats se trouvaient postés le long du rempart sous le couvert d’une double galerie, et l’on voyait au sommet des tours une troisième plateforme spacieuse et sûre. Il paraît

  1. Procope (Persic., l. I, c. 10 ; l. II, c. 13 ; De ædific., l. II, c. 1, 2, 3 ; l. III, c. 5) décrit Dara longuement et avec exactitude. Voy. sa situation dans d’Anville (l’Euphrate et le Tigre, p. 53, 54, 55) ; mais cet écrivain paraît doubler l’intervalle entre Dara et Nisibis.