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Satala et de Mélitène, qui furent réparés par Justinien pour servir de boulevarts à la Petite-Arménie ; il s’approche insensiblement de la Méditerranée jusqu’à ce qu’enfin, repoussé par le mont Taurus[1], il replie au sud-est son cours long et tortueux jusqu’à son embouchure dans le golfe Persique. Parmi les villes romaines situées au-delà de l’Euphrate, on en distingue deux nouvelles qui tirèrent leur nom de Théodose et de quelques martyrs ; et deux capitales, Amida et Édesse, célèbres à toutes les époques de l’histoire. Justinien proportionna leur force aux dangers de leur position. Un fossé et une palissade suffisaient souvent contre les invasions mal habiles de la cavalerie des Scythes ; mais il fallait d’autres ouvrages pour soutenir un siége régulier contre les armes et les trésors du grand roi. Ses savans ingénieurs connaissaient l’art de diriger de profondes mines et d’élever une plate-forme à la hauteur des remparts ; il renversait avec ses machines de guerre les plus robustes créneaux, et quelquefois faisait marcher à l’assaut une ligne de tours mobiles, portées sur des éléphans. Dans les grandes villes de l’Orient, le désavantage du terrain, peut-être de la position, était compensé par le zèle du peuple, qui aidait la garnison à défendre son pays et sa religion ;

  1. Ni Taurus obstet, in nostra maria venturus. Pomponius-Mela, III, 8. Pline, qui est tout à la fois poète et naturaliste (V, 20), personnifie le fleuve et la montagne, et décrit leur combat. Voy. le cours du Tigre et de l’Euphrate, dans l’excellent Traité de M. d’Anville.