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chasteté après son mariage paraît incontestable, car ses plus implacables ennemis ne lui adressent pas le moindre reproche sur cet objet ; et quoique la fille d’Acacius pût être rassasiée d’amour, on doit cependant quelques éloges à la fermeté de caractère qui lui fit sacrifier ses plaisirs ou ses habitudes au sentiment plus fort de son devoir ou de son intérêt. Malgré ses vœux et ses prières, elle n’eut jamais de fils légitime, et elle vit mourir en bas âge, sa fille, seul fruit de son union avec Justinien[1]. Son empire, cependant, sur l’esprit de l’empereur fut toujours absolu ; elle conserva par son habileté ou par son mérite toute l’affection de son époux, et leurs brouilleries apparentes devinrent funestes dans tous les temps aux courtisans qui les crurent sincères. Les débauches de sa jeunesse avaient peut-être altéré son tempérament ; mais sa santé fut toujours délicate, et ses médecins lui ordonnèrent les bains chauds de Pythie. Le préfet du prétoire, le grand-trésorier, plusieurs comtes et patriciens, et un brillant cortége de quatre mille personnes, la suivirent dans ce voyage. On répara les grands chemins à son approche ; on éleva un palais pour la recevoir ; en traversant la Bithynie, elle distribua des aumônes considérables aux églises, aux monastères et aux hôpitaux, à condition qu’ils imploreraient le ciel pour le réta-

  1. Saint Sabas refusa de prier pour qu’il naquît un fils à Théodora, dans la crainte de voir renaître dans ce fils un hérétique pire qu’Anastase lui-même. (S. Cyril., in vit. S. Sabæ, apud Aleman., p. 70-109.)