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union par la perte de la liberté nationale et de l’esprit militaire ; et, dénuées de vie et de mouvement, ces provinces asservies attendaient leur salut de troupes mercenaires et de gouverneurs dirigés par les ordres d’une cour éloignée. Le bonheur de cent millions d’individus dépendait du mérite personnel d’un ou deux hommes, peut-être de deux enfans dont l’éducation, le luxe et le despotisme avaient corrompu le caractère et les inclinations. Ce fut sous les minorités des fils et des petits-fils de Théodose, que l’empire reçut les plus profondes blessures ; et lorsque ces princes méprisables parurent avoir atteint l’âge de la virilité, ils abandonnèrent l’Église aux évêques, l’État aux eunuques, et les provinces aux Barbares. Aujourd’hui l’Europe est divisée en douze royaumes puissans, quoique inégaux, trois républiques respectables, et un grand nombre d’autres souverainetés plus petites, mais indépendantes. Les chances de talens dans les princes et les ministres sont au moins multipliées en raison du nombre des souverains : un Julien, une Sémiramis, peuvent régner dans le Nord, tandis qu’Arcadius et Honorius dorment encore sur les trônes du Midi. L’influence réciproque de la crainte et de la honte arrêtent l’abus de la tyrannie. Les républiques ont acquis de l’ordre et de la stabilité ; les monarchies ont adopté des maximes de liberté ou au moins de modération ; et les mœurs générales du siècle ont

    tribus moresques ou les Bagaudes de la Gaule et de l’Espagne, vol. II, p. 181 ; vol. VI, p. 108, 230, 378.