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OBSERVATIONS GÉNÉRALES
sur la chute de l’empire romain dans l’occident.

Les Grecs, lorsque leur patrie eut été réduite au rang de province romaine, attribuèrent les triomphes de la république à sa fortune plutôt qu’à ses vertus. L’inconstante déesse, qui distribue et reprend si aveuglément ses faveurs, a enfin consenti, disaient d’envieux flatteurs, à abandonner sa roue, à quitter ses ailes, et à établir pour toujours son trône sur les bords du Tibre[1]. Un Grec plus judicieux, qui a composé philosophiquement l’histoire mémorable de son siècle, détruisit cette vaine illusion de ses compatriotes, en découvrant à leurs regards les fondemens profonds et solides de la grandeur des Romains[2]. Les préceptes de l’éducation et les préjugés de la

  1. Telles sont les expressions figurées de Plutarque (oper., t. II, p. 318, édit. Wechel.), à qui, sur l’autorité de son fils Lamprias (Fabr., Bibl. græc, t. III, p. 341), j’attribuerai hardiment la déclamation malveillante περιτης Ρωμαιων τυχης. Les mêmes opinions régnaient chez les Grecs deux cent cinquante ans avant Plutarque ; et Polybe (Hist., l. I, p. 90, édit. Gronov., Amster. 1670) annonce positivement l’intention de les réfuter.
  2. Voyez les restes inestimables du sixième livre de Polybe, et différens autres passages de son Histoire générale, particulièrement une digression de son dix-septième livre, dans laquelle il compare la phalange et la légion.