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miers moines, et le fondateur des bénédictins déclame contre l’intempérance du siècle, qui le forçait d’accorder un demi-setier de vin par jour à chaque religieux[1]. Les vignes de l’Italie fournirent aisément cette modique provision, et ses disciples victorieux, lorsqu’ils passèrent les Alpes, le Rhin ou la mer Baltique, exigèrent, au lieu de vin, une mesure proportionnée de cidre ou de bière forte.

Leurs travaux.

Le candidat qui aspirait à la vertu de pauvreté évangélique, abjurait, en entrant dans une communauté, l’idée et même le nom de toute possession exclusive ou particulière[2] ; les frères vivaient en commun du fruit de leurs travaux manuels ; le travail leur était recommandé comme pénitence, comme exercice, et comme le moyen le plus estimable d’assurer leur subsistance[3]. Les moines

  1. Voyez la Règle de saint Benoît, nos 39, 40, in cod. Regul., part. II, p. 41, 42. Licet legamus vinum omninò monachorum non esse ; sed quia nobis temporibus id monachis non persuaderi potest. Il leur accorde une hemina romaine, mesure qui peut être évaluée d’après les tables d’Arbuthnot.
  2. Toutes les expressions, comme mon livre, mon manteau, mes souliers, étaient sévèrement défendues chez les moines de l’Occident (cod. Reg., part. II, p. 174, 235-288), et la Règle de Colomban les punissait de six coups de discipline. L’auteur ironique des Ordres monastiques, qui plaisante sur les minuties extravagantes des couvens modernes, semble ignorer que les anciens n’étaient pas moins ridicules.
  3. Deux grands maîtres de la science ecclésiastique, le père Thomassin (Discipl. de l’Église, t. III, p. 1090-1139)