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l’empereur eût été bien dirigée, elle serait tombée sur la tête du coupable Romanus ; mais le comte, dès long-temps instruit dans l’art de corrompre, avait dépêché de son côté un prompt et fidèle messager chargé de lui assurer la faveur vénale de Remigius, grand-maître des offices. Des artifices trompèrent la sagesse du conseil impérial, et des délais refroidirent la vertueuse indignation qu’avaient excitée les plaintes des Tripolitains. Une seconde incursion les ayant obligés de les renouveler, la cour de Trèves envoya Palladius examiner l’état de l’Afrique et la conduite de Romanus. La rigidité de Palladius ne fut pas difficile à désarmer. S’étant laissé séduire par le désir de s’approprier une partie du trésor qu’il avait apporté pour payer les troupes, une fois criminel, il ne pouvait se refuser à reconnaître l’innocence et le mérite de Romanus. L’accusation des Tripolitains fut déclarée fausse et sans fondement ; Palladius retourna de Trèves en Afrique avec une commission spéciale pour rechercher et punir les auteurs de cette conspiration sacrilège contre les représentans du souverain. Les informations se firent avec tant d’adresse et de succès, que les habitans de Leptis, qui venaient de soutenir un siége de huit jours, se dédirent et blâmèrent la conduite de leurs députés. L’aveugle cruauté de Valentinien se hâta de prononcer un arrêt sanguinaire. Le président du conseil de Tripoli, qui avait osé gémir sur les malheurs de la province, fut exécuté publiquement à Utique avec quatre des principaux citoyens,