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s’élancèrent dans leur camp. La surprise produisit le désordre, le désordre fut suivi de la déroute et de l’épouvante, et cette multitude confuse des plus braves guerriers tomba sans défense sous les épées et les traits des soldats romains et des auxiliaires. Ceux qui prirent la fuite se réfugièrent à la troisième et principale armée, dans les plaines Catalauniennes, près la ville de Châlons en Champagne : on fit précipitamment rentrer les détachemens dispersés, et les chefs des Barbares, alarmés et avertis par le désastre de leurs compagnons, se préparèrent à combattre, dans une bataille générale et décisive, les forces victorieuses du lieutenant de Valentinien. Ce combat sanglant et opiniâtre se soutint, durant toute une journée d’été, avec une valeur égale et des succès alternatifs. Les Romains, vainqueurs à la fin, perdirent environ douze cents hommes. Les Allemands laissèrent six mille morts sur le champ de bataille, et quatre mille furent blessés. Le brave Jovin, après avoir chassé jusque sur les bords du Rhin les restes de leur armée en déroute, revint à Paris jouir des applaudissemens de son souverain, et recevoir la dignité de consul pour l’année suivante[1]. Les Romains déshonorèrent leur triomphe par le traitement indigne qu’ils firent essuyer à un roi captif. Ils le pendirent à un gibet, à l’insu de

  1. On trouve la description de ces batailles dans Ammien (XXVII, 2), et dans Zosime (l. IV, p. 209). Ce dernier suppose que Valentinien y était en personne.