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tenaient leurs assemblées religieuses, et la fermentation des esprits tarda long-temps à se calmer. Quand je considère l’éclat de la capitale, je ne suis point surpris qu’une acquisition si précieuse enflamme le désir des hommes ambitieux, et produise les débats les plus violens et les plus opiniâtres : le candidat qui réussit est sûr d’être enrichi par la libéralité des matrones[1] ; il sait qu’après avoir orné sa personne d’une parure élégante, il pourra parcourir les rues de Rome dans son char, et que la table des empereurs n’égalera pas en délicatesse et en profusion ce que prodiguera sur la sienne le goût et la magnificence d’un pontife romain[2]. Combien ces pontifes, par des moyens plus raisonnables, ne s’assureraient-ils pas un bonheur plus vrai, ajoute l’honnête païen, si, au lieu d’alléguer la grandeur de la ville pour excuse de leurs mœurs, ils imitaient la vie exemplaire de quelques évêques des provinces, dont la tempérance et la sobriété, l’humble extérieur et les regards baissés, rendent les vertus pures et

    ronius, A. D. 367, no 3 ; et Donat, Roma antiqua et nova, l. IV, c. 3, p. 462.)

  1. Les ennemis de Damase l’appelaient Auriscalpius matronarum, cure-oreille des femmes.
  2. Saint Grégoire de Nazianze (orat. 32, p. 526) peint le luxe et l’orgueil des prélats des villes impériales, leurs chars dorés, leurs chevaux fougueux et leur suite nombreuse, etc. La foule s’écartait devant eux comme elle l’aurait pu faire devant des bêtes féroces.