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dés que le Dieu des chrétiens combattrait pour eux, se sentirent animés d’une force qui ajoutait à leur valeur ordinaire. Dans ce combat, long-temps soutenu avec un courage et un succès égal, le chef des Alains, dont la petite taille et l’air sauvage recelaient une âme magnanime, prouva l’injustice des soupçons formés contre sa fidélité par le courage avec lequel il combattit et mourut pour les Romains, Claudien a conservé imparfaitement dans ses vers la mémoire de ce vaillant barbare dont il célèbre la gloire sans nous apprendre son nom. En le voyant tomber, les escadrons qu’il commandait perdirent courage et prirent la fuite, et la défaite de l’aile de cavalerie aurait pu décider la victoire en faveur d’Alaric, si Stilichon ne fût pas promptement arrivé à la tête de toute l’infanterie romaine et barbare. Le génie du général et la valeur des soldats surmontèrent tous les obstacles ; et sur le soir de cette sanglante journée, les Goths se retirèrent du champ de bataille ; leurs retranchemens furent forcés ; le pillage du camp et le massacre des Barbares payèrent quelques-uns des maux dont ils avaient accablé les sujets de l’empire[1]. Les vétérans de l’Occident s’enrichirent des dépouilles magnifiques de Coryn-

  1. Orose cherche, par des expressions ambiguës, à faire entendre que les Romains furent vaincus : « Pugnantes vicimus, victores victi sumus. » Prosper (in Chron.) en fait une bataille sanglante et douteuse ; mais les écrivains des Goths, Cassiodore (in Chron.) et Jornandès (De rebus get., c. 29}, prétendent à une victoire décisive.