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Lucien, prêtre de Jérusalem, et ministre ecclésiastique du village de Caphargamala[1], environ à vingt milles de la ville, raconta un songe singulier, qui, pour écarter tous ses doutes, s’était offert à lui pendant trois samedis consécutifs. Une figure vénérable s’était présentée devant lui, dans le silence de la nuit, portant une longue barbe, vêtue d’une robe blanche et tenant une verge d’or dans sa main. Ce fantôme s’annonça sous le nom de Gamaliel, et apprit au prêtre étonné que son corps, celui de son fils Abibas, de son ami Nicodème, et enfin celui de l’illustre Étienne, le premier martyr du christianisme, avaient été enterrés secrètement dans le champ voisin. Il ajouta avec quelque impatience qu’il était temps de les délivrer, lui et ses compagnons, de leur obscure prison ; que leur apparition dans le monde serait un remède salutaire à ses maux, et qu’ils choisissaient Lucien pour avertir l’évêque de Jérusalem de leur situation et de leurs désirs. De nouvelles visions vinrent à mesure éclaircir les doutes et lever les difficultés qui retardaient l’exécution de cette importante entreprise ; le prélat fit

  1. Lucien composa en grec son récit ; Avitus le traduisit, et Baronius le publia (Annal. ecclés., A. D. 415, nos 7-16). Les éditeurs bénédictins de saint Augustin ont donné, à la fin de l’ouvrage De Civitate Dei, deux différens textes, accompagnés de nombreuses variantes. C’est le caractère du mensonge que d’être vague et inconséquent. Tillemont (Mém. ecclés., t. II, p. 9, etc.) a adouci les parties de la légende qui choquent le bon sens.