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pable de suspendre le cours éternel des planètes et la liberté des opérations de l’esprit humain. Tous les peuples redoutaient la puissance mystérieuse des mots magiques et des enchantemens, des herbes puissantes et des cérémonies exécrables qui pouvaient ôter ou rendre la vie, enflammer les passions de l’âme, anéantir les œuvres de la création, et arracher à la résistance des démons les secrets de l’avenir. Ils étaient assez inconséquens pour supposer que cette suprême puissance sur le ciel, la terre et les enfers pouvait être exercée par de misérables sorciers ambulans qui, l’employant seulement pour satisfaire aux plus vils motifs d’intérêt ou de méchanceté, passaient leur vie obscure dans la misère et le mépris[1]. Les lois de Rome et l’opinion publique condamnaient également la magie ; mais comme cet art

    pu défendre cette distinction obscure contre la logique serrée de Bayle. Dans le système des juifs et des chrétiens, tous les démons sont des esprits infernaux, et tout commerce avec eux est un crime digne de mort et de damnation éternelle.

  1. La Canidia d’Horace (Carm., l. V, Od. 5, avec les notes de Dacier, et les explications de Sanadon) est une magicienne connue. L’Érictho de Lucain (Pharsal. VI, 430-830) est ennuyeuse et même dégoûtante, mais quelquefois sublime. Elle reproche aux Furies leur délai, et les menace, avec des expressions effrayantes par leur obscurité, de les appeler par leurs véritables noms, de faire connaître sous ses traits véritables l’infernale et mystérieuse Hécate, et d’invoquer les puissances secrètes qui habitent au-dessous des enfers.