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et persuader que la mort du prince était l’effet de son propre désespoir[1]. On conduisit le corps de l’empereur avec la pompe ordinaire dans le sépulcre de Milan, et l’archevêque prononça une oraison funèbre, dans laquelle il déplora ses malheurs, et fit l’éloge de ses vertus[2]. Dans cette occasion, saint Ambroise dérogea singulièrement, sans doute par humanité, à son système de théologie, et tâcha de calmer la douleur des deux sœurs de Valentinien, en leur affirmant que le pieux empereur serait admis sans difficulté dans le séjour de la béatitude éternelle quoiqu’il n’eût pas reçu le sacrement de baptême[3].

Usurpation d’Eugène. A. D. 392-394.

Aborgaste avait préparé avec prudence le succès de ses desseins ambitieux ; et les habitans des provinces, en qui se trouvait éteint tout sentiment de patriotisme et de fidélité, attendaient avec résignation le maître inconnu qu’il plairait à un Franc de placer sur le trône impérial. Quelques préjugés d’orgueil semblaient encore s’opposer à l’élévation d’Ar-

  1. Godefroy (Dissert. ad Philostorg., p. 429-434) a rassemblé avec soin toutes les circonstances de la mort de Valentinien II. Les sentimens opposés et l’ignorance des contemporains prouvent qu’elle fut secrète.
  2. De obitu Valentinian., t. II, p. 1173-1196. Il est contraint de s’envelopper dans un langage obscur ; cependant il s’exprime avec plus de liberté qu’aucun laïque ou aucun autre ecclésiastique n’aurait osé le faire.
  3. Voyez c. 51, p. 1188 ; c. 75, p. 1193. Don Chardon (Hist. des Sacremens, t. I, p. 86), en avouant que saint Ambroise affirme la nécessité indispensable du baptême, tâche de concilier cette contradiction.