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rumeur excitait la crainte ou l’espérance des citoyens d’Antioche. Ils entendaient avec frayeur annoncer que l’empereur, violemment irrité des insultes faites à ses statues, et plus encore des indignités commises sur celles de son épouse bien aimée, avait résolu de raser la ville et de massacrer, sans distinction d’âge ou de sexe, tous les habitans[1], dont une partie chercha un refuge dans les montagnes de Syrie et dans le désert voisin. [22 mars.]Enfin, après vingt-quatre jours d’attente et d’inquiétude, le général Hellebicus et Césarius, maître des offices, prononcèrent les ordres de l’empereur et la sentence d’Antioche. Cette orgueilleuse capitale fut dégradée de son rang et perdit le nom et les droits de cité. On dépouilla la métropole d’Orient de ses terres, de ses priviléges et de ses revenus, et on l’assujettit, sous la dénomination humiliante de village, à la juridiction de Laodicée[2] ; on ferma les bains, le cirque et les théâtres ; et pour la priver en même temps des plaisirs et de l’abondance, Théodose enjoignit sévèrement de sup-

  1. Libanius (orat. I, p. 6, edit. Venet.) déclare que sous un semblable règne la crainte du massacre était absurde, surtout pendant l’absence de l’empereur ; car sa présence, selon cet éloquent esclave, aurait pu légitimer les actions les plus sanguinaires.
  2. Laodicée, sur le bord de la mer, à soixante-cinq milles d’Antioche (Voyez Noris, Époch. Syro-Maced., Dissert. III, p. 230). Les habitans d’Antioche trouvèrent mauvais que la ville de Séleucie, qui dépendait de leur capitale, eût la présomption d’intercéder en leur faveur.