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assurèrent dans le sein du despotisme l’indépendance de leur gouvernement particulier, et reconnurent la souveraineté de l’empereur sans se soumettre à la juridiction inférieure des lois et des magistrats romains. Les tribus et les familles continuèrent d’être commandés, soit en temps de paix, soit en temps de guerre, par leurs chefs héréditaires ; mais la dignité royale fut abolie, et l’empereur pouvait à son gré nommer et destituer les généraux de la nation. Il entretenait un corps de quarante mille Goths pour la défense de l’empire d’Orient, et ces troupes audacieuses, qui prenaient le nom fœderati ou alliés, étaient distinguées par leurs colliers d’or, une paye considérable, et des priviléges dont l’étendue allait jusqu’à la licence. Ils ajoutèrent à leur courage national l’usage des armes et l’esprit de la discipline ; et tandis que les forces suspectes des Barbares gardaient ou menaçaient l’empire, les dernières étincelles du génie militaire s’éteignaient dans l’âme des Romains[1]. Théodose eut l’adresse de persuader à ses alliés, que les conditions de paix arrachées à sa prudence par la nécessité, étaient l’expression sincère de son amitié pour la nation des Goths[2] ; mais il

  1. Comparez Jornandès (XX, 27) qui rend compte de l’état et du nombre des Goths, fœderati, avec Zosime (l. IV, p. 258), qui cite leurs colliers d’or, et Pacatus (in Panegyr. vet., XII, 37), qui applaudit avec une joie fausse ou insensée à leur bravoure et à leur discipline.
  2. Amator pacis generisque Gothorum. Tel est le langage de l’historien des Goths (c. 29) : il représente sa nation