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valeur ne leur fut d’aucun secours. Alathæus, roi ou général des Ostrogoths, périt avec les plus braves de ses soldats, ou dans les eaux du fleuve, ou par l’épée des Romains. La dernière division de cette malheureuse flotte aurait pu regagner le rivage d’où elle était partie ; mais la terreur et le désordre ne laissaient aux vaincus ni la faculté d’agir ni la liberté de penser ; ils se rendirent à discrétion, en implorant la clémence des vainqueurs. Dans cette occasion, comme dans beaucoup d’autres, il n’est pas facile de concilier les passions et les préjugés des écrivains du siècle de Théodose. Ceux qui se plaisent à blâmer ou à défigurer toutes les actions de son règne, affirment que le lieutenant Promotus avait assuré la déroute des Barbares par sa valeur et son intelligence, avant que l’empereur hasardât de paraître sur le champ de bataille[1]. Le poète complaisant, qui célébrait à la cour d’Honorius la gloire du père et celle du fils, attribue tout l’honneur de la victoire à l’intrépidité de Théodose, et fait presque entendre qu’il tua dans le combat le roi des Ostrogoths[2]. La

  1. Zosime, l. IV, p. 252, 255. Il montre souvent son peu de jugement en défigurant une histoire sérieuse par des circonstances frivoles et incroyables.
  2. … Odothœi regis opima
    Retulit…

        Ver. 632.

    Les opima étaient les dépouilles qu’un général ne pouvait acquérir qu’après avoir tué de sa propre main le roi ou le général de l’ennemi ; et les siècles brillans de Rome n’en offrent que trois exemples.