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ou l’on retint pour la défense de la Gaule les légions qui avaient reçu l’ordre de partir pour la Pannonie ; Nanienus et Mellobaudes partagèrent le commandement militaire ; et quoique le jeune empereur respectât la sagesse et l’expérience du premier, il se sentait plus disposé à admirer, à imiter l’ardeur martiale de son collègue, à qui il permit de réunir les deux titres incompatibles de comte des domestiques et de roi des Francs. Priarius, roi des Allemands, se laissait également guider ou plutôt emporter par une valeur impétueuse. Les deux armées, animées de l’esprit de leurs chefs, se cherchèrent, s’aperçurent et se chargèrent près la ville d’Argentaria ou Colmar[1], dans les plaines de l’Alsace. La discipline des Romains, leurs savantes évolutions et leurs traits redoutables eurent tout l’honneur de la victoire. Les Allemands conservèrent long-temps leur terrain, et y furent impitoyablement massacrés. Environ cinq mille Barbares échappèrent à la mort en fuyant dans les bois et dans les montagnes. Priarius, mort glorieusement sur le champ de bataille, évita les reproches du peuple, toujours disposé à blâmer comme injuste et impolitique une guerre malheureuse. Après cette victoire, qui assura la paix de la Gaule et la gloire des armes romaines, l’empereur partit sans

  1. M. d’Anville (Notice de l’ancienne Gaule, p. 96-99) fixe exactement le champ de bataille, Argentaria ou Argentovaria, à vingt-trois lieues ou trente-quatre milles et demi romains au sud de Strasbourg. C’est des ruines de cette ville que s’est élevée tout à côté celle de Colmar.