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Les empereurs Gratien et Valentinien II.

Un auteur ecclésiastique atteste sérieusement la polygamie de Valentinien[1]. « L’impératrice Sévéra (ce sont les expressions dans lesquelles a été racontée cette fable) ayant admis à sa familiarité la belle Justine, fille d’un gouverneur d’Italie, fut si vivement frappée de ses charmes, qu’elle avait eu souvent l’occasion d’admirer dans le bain, qu’elle en fit imprudemment devant l’empereur un éloge si détaillé, que celui-ci, tenté d’introduire dans son lit une seconde épouse, accorda par un édit à tous les sujets de son empire dans leurs liens domestiques, la même liberté qu’il s’était permise. » Mais nous pouvons assurer, sur l’autorité de l’histoire et de la raison, que Valentinien n’eut Sévéra et Justine pour épouses que l’une après l’autre, se servant de la liberté du divorce, que les lois romaines autorisaient encore, quoique condamné par l’Église. Sévéra était mère de Gratien, qui semblait réunir tous les droits à la succession de l’empire d’Occident. Fils aîné d’un empereur dont le règne glorieux avait confirmé le choix libre et honorable de ses compagnons d’armes, dès l’âge de neuf ans, il avait reçu des mains d’un père indulgent,

  1. Socrate (l. IV, c. 31) est le seul écrivain original qui atteste cette histoire peu croyable, et si opposée aux lois et aux mœurs des Romains, qu’elle ne méritait pas la savante Dissertation de M. Bonamy (Mém. de l’Acad., tom. XXX, p. 394-405). Cependant je voudrais conserver la circonstance naturelle du bain, au lieu de suivre Zosime. qui représente Justine comme une femme âgée et veuve de Magnence.