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roi des Chionites, présentait le maintien austère d’un guerrier vénérable par ses années, et célèbre par ses exploits. À la droite de Sapor était, dans un rang pareil, le roi d’Albanie, qui amenait des rives de la mer Caspienne ses tribus indépendantes. Les satrapes et les généraux étaient placés selon leur rang, et en outre de la foule immense de femmes et d’esclaves qui suivent toujours les armées orientales, on comptait plus de cent mille combattans effectifs, tous exercés à la fatigue, et choisis parmi les plus braves nations de l’Asie. Le transfuge romain, qui dirigeait en grande partie le conseil de Sapor, lui avait sagement recommandé de ne pas perdre la belle saison à entreprendre des siéges longs et difficiles ; mais de marcher vers l’Euphrate, et de s’emparer sans délai de la faible et opulente capitale de la Syrie. Mais à peine entrés dans les plaines de la Mésopotamie, les Perses s’aperçurent qu’on avait pris toutes les précautions propres à retarder leurs progrès et à déconcerter leurs desseins. Les habitans et leurs troupeaux étaient retirés dans des forteresses ; les fourrages verts avaient été brûlés sur pied ; des pieux serrés et pointus défendaient les gués des rivières ; on avait garni la rive opposée de machines de guerre, et la crue favorable des eaux de l’Euphrate ne permit point aux Barbares de tenter le passage sur le pont de Thapsacus. L’habile Antoninus changea son plan d’opérations, et conduisit l’armée par un long détour, mais à travers des territoires fertiles, vers la source de l’Euphrate, où le peu de profondeur de