Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 4.djvu/205

Cette page a été validée par deux contributeurs.

inadmissible qui pût constater l’hérésie et les suites dangereuses de l’arianisme. On lut publiquement et on déchira avec mépris une lettre dans laquelle Eusèbe de Nicomédie, le protecteur des ariens, avouait ingénument que l’admission de l’homoousion ou consubstantiel, expression familière aux platoniciens, était incompatible avec leur système de théologie. Les évêques qui faisaient la loi dans le concile saisirent avidement cette heureuse occasion ; et, suivant l’énergique expression de saint Ambroise[1], le glaive que l’hérésie avait elle-même tiré du fourreau leur servit pour abattre la tête de ce monstre détesté. La consubstantialité du père et du fils fut établie par le concile de Nicée ; et elle a été unanimement reçue comme un article fondamental de la foi chrétienne par le consentement des Églises grecques, latines, orientales et protestantes. Mais si le même mot n’eût pas servi également à rendre les hérétiques odieux et à unir les catholiques, il n’aurait pas rempli le but de la majesté du concile qui l’avait adopté comme un article de foi. Cette majorité était divisée en deux partis, dont l’un penchait pour les opinions des trithéistes, et l’autre pour celles des sabelliens. Mais comme ces deux extrêmes semblaient saper ou la religion naturelle ou la révéla-

  1. Nous sommes redevables à saint Ambroise (De Fide, l. III, c. ult.) de la connaissance de cette anecdote curieuse. Hoc verbum posuerunt patres, quod viderunt adversariis esse formidini ; ut tanquam evaginato ab ipsis gladio, ipsum nefandæ caput heræseos amputarent.