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mélange de la foi mosaïque et de la philosophie des Grecs[1] dans les Œuvres de Philon, que

  1. La philosophie de Platon n’était pas la seule source de celle qu’on professait dans l’école d’Alexandrie. Cette ville, où se réunirent des lettrés grecs, juifs, égyptiens, fut le théâtre d’un bizarre amalgame de systèmes de ces trois peuples. Les Grecs y apportèrent un platonisme déjà altéré ; les Juifs, qui avaient pris à Babylone un grand nombre d’idées orientales, et dont les opinions théologiques ou philosophiques avaient subi de grands changemens par ces communications, s’efforcèrent de concilier le platonisme avec leur nouvelle doctrine, et le défigurèrent entièrement ; enfin les Égyptiens, qui ne voulaient pas abandonner des idées pour lesquelles les Grecs eux-mêmes avaient du respect, travaillèrent de leur côté à les arranger avec celles de leurs voisins. C’est dans l’Ecclésiastique et dans le livre de la Sagesse que se fait sentir l’influence de la philosophie orientale plutôt que celle du platonisme : en trouve dans ces livres et dans ceux des derniers prophètes, comme Ézéchiel, des idées que les Juifs n’avaient pas avant la captivité de Babylone, dont on ne saurait trouver le germe dans Platon, et qui viennent visiblement des Orientaux. Ainsi Dieu, présenté sous l’image de la lumière, et le principe du mal sous celui des ténèbres, l’histoire des bons et des mauvais anges, le paradis et l’enfer, etc., sont des dogmes dont l’origine, ou tout au moins la détermination positive, ne saurait être rapportée qu’à la philosophie orientale. Platon croyait la matière éternelle ; les Orientaux et les Juifs la regardaient comme une création de Dieu, seul éternel. Il est impossible d’expliquer la philosophie de l’école d’Alexandrie par le seul mélange de la théologie judaïque et de la philosophie grecque ; la philosophie orientale, quelque peu