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morts à cinquante-quatre mille, et la perte des vainqueurs fut supérieure à celle des vaincus[1]. Cette circonstance prouve l’acharnement du combat, et justifie l’observation d’un ancien écrivain qui prétend que la fatale bataille de Mursa avait épuisé les forces de l’empire par la perte d’une armée de vétérans suffisante pour défendre les frontières ou pour ajouter à la gloire de Rome de nouveaux triomphes[2]. Malgré les invectives d’un orateur servile, on ne trouve aucun motif de croire que Magnence ait déserté ses drapeaux dès le commencement de la bataille ; il paraît au contraire qu’il s’acquitta de son devoir, comme capitaine et comme soldat, jusqu’au moment où son camp fut au pouvoir des ennemis. Pensant alors à sa sûreté personnelle, il se dépouilla des ornemens impériaux, et ce ne fut pas sans peine qu’il échappa aux détachemens de cavalerie légère

  1. Zonare dit que Constance perdit trente mille hommes, sur les quatre-vingts qui composaient son armée, et que Magnence en perdit vingt-quatre mille sur trente-six. Les autres détails de sa narration paraissent probables et authentiques ; mais l’auteur ou les copistes doivent s’être trompés sur le nombre des troupes du tyran. Magnence avait rassemblé toutes les forces de l’Occident, les Romains et les Barbares, et il en avait formé une armée redoutable, qu’on ne peut estimer à moins de cent mille hommes. (Jul., orat. 1, p. 34, 35.)
  2. Ingentes R. I. vires eâ dimicatione consumptæ sunt, ad quælibet bella externa idoneæ, quæ multum triumphorum possent, securitatisque conferre. (Eutrope, X, 13.) Victor le jeune parle dans le même sens.