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On a blâmé, avec raison, Constantin d’une autre innovation qui corrompit la discipline militaire, et précipita la ruine de l’empire. Les dix-neuf années qui précédèrent sa dernière victoire sur Licinius avaient été un temps de licence et de guerre civile. [Distinction des troupes.]Les rivaux qui se disputaient l’empire du monde romain, avaient retiré la plupart des troupes destinées à la défense des frontières communes de l’empire, et les grandes villes situées sur les confins de leurs états respectifs, étaient remplies de soldats qui regardaient leurs concitoyens comme leurs plus implacables ennemis. Quand la fin de cette guerre civile eut rendu inutiles les garnisons intérieures, l’empereur n’eut pas assez de sagesse ou de fermeté pour ramener la discipline sévère de Dioclétien, et mettre un terme à la fatale indulgence dont l’habitude avait fait, pour l’ordre militaire, un besoin et presque un droit. Depuis le règne de Constantin, il se forma une distinction d’opinion et même une distinction légale entre les troupes palatines[1], que l’on nommait improprement les troupes de la cour, et celles qui gardaient les frontières. Les premières, fières de la supériorité de leur solde et de leurs priviléges, excepté dans le cas d’une guerre extraordinaire, passaient

  1. Zosime, l. II, p. 3. Les historiens, les lois et la Notitia indiquent, d’une manière très-obscure, les deux classes des troupes romaines. On peut consulter cependant le Paratitlon, ou extrait étendu que Godefroy a tiré du septième livre De re militari, du cod. Théod., l. VII, tit. I, leg. 18 ; l. VIII, tit. I, leg. 10.