Page:Gibbon - Histoire de la décadence et de la chute de l'Empire romain, traduction Guizot, tome 3.djvu/363

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ment à tous les chefs militaires. Ces commandans de province étaient par conséquent connus sous le nom de ducs. Dix seulement obtinrent celui de comtes ou compagnons, titre d’honneur, ou plutôt de faveur, récemment inventé à la cour de Constantin. Un baudrier d’or était la marque distinctive de la dignité de comte et de duc. On leur faisait, en outre de leurs appointemens, une forte pension, pour qu’ils entretinssent cent quatre-vingt-dix valets et cent cinquante-huit chevaux. Il leur était expressément défendu de se mêler d’aucune affaire relative à l’administration de la justice, ou des deniers publics ; mais leur autorité sur les troupes qu’ils commandaient était tout-à-fait indépendante des magistrats. Constantin introduisit la balance délicate de l’autorité civile et militaire, à peu près dans le même temps qu’il donna une sanction légale à l’ordre ecclésiastique. L’émulation, et quelquefois la discorde qui régnait entre deux professions si incompatibles d’humeur et d’intérêt, produisit de bons et de mauvais effets. On ne pouvait guère présumer que le général et le gouverneur civil d’une province s’uniraient pour la troubler ou pour la servir. Tandis que l’un négligeait d’offrir les secours que l’autre ne daignait pas demander, les troupes restaient souvent sans ordres et sans subsistances ; la sûreté publique était trahie, et les sujets, abandonnés de leurs défenseurs, étaient exposés aux incursions des Barbares. Le partage de l’administration fait par Constantin assura la tranquillité du monarque ; mais il relâcha le nerf de l’état.