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ecclésiastique, Eusèbe lui-même, avoue indirectement qu’il a rapporté tout ce qui pouvait ajouter à la gloire de l’Église, et qu’il a supprimé tout ce qui pouvait tendre à la déshonorer[1]. Une pareille déclaration nous porte naturellement à soupçonner qu’un écrivain qui a violé si ouvertement une des deux lois fondamentales de l’histoire, n’a pas observé l’autre avec beaucoup d’exactitude ; et ce soupçon acquerra une nouvelle force, si l’on considère le caractère d’Eusèbe, moins crédule et plus versé dans les intrigues de cour que la plupart de ses

    « car, quand vous êtes saisis, leur dit-il, vous êtes traînés au supplice, et avant d’être mis à mort, vous avez à souffrir toutes sortes de tourmens. » (Origène, cont. Cels., l. I, II, VI, VIII, passim.) Libanius, le panégyriste de Julien, dit en parlant des chrétiens : « Ceux qui suivaient une religion corrompue étaient dans de continuelles appréhensions ; ils craignaient que Julien n’inventât des tourmens encore plus raffinés que ceux auxquels ils étaient exposés auparavant, comme d’être mutilés, brûlés vifs, etc. ; car les empereurs avaient exercé contre eux toutes ces cruautés. » (Libanii parentalis in Julian., ap. Fab. Bibl. græc., v. 9, no 58, p. 283.) (Note de l’Éditeur.)

  1. Telle est l’induction que l’on peut tirer naturellement des deux passages remarquables dans Eusèbe, l. VIII, c. 2, et De mart. Palest., c. 12. La prudence de l’historien a exposé son caractère au blâme et au soupçon. Personne n’ignorait qu’il avait été mis lui-même en prison, et l’on insinuait qu’il avait acheté sa liberté par quelques lâches complaisances. On lui en fit des reproches durant sa vie, et même en sa présence, au concile de Tyr. Voyez Tillemont, Mém. ecclés., t. VIII, part. I, p. 67.