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de placer une histoire très-remarquable, dont les circonstances ont été rapportées si diversement et avec tant d’improbabilité, qu’elle sert plutôt à exciter notre curiosité qu’à la satisfaire. Dans une petite ville de Phrygie, dont on nous a laissé ignorer le nom aussi-bien que la situation, les magistrats et le corps entier du peuple avaient, à ce qu’il paraîtrait, embrassé la foi chrétienne. Comme le gouverneur de la province pouvait appréhender quelque résistance, il se fit accompagner d’un nombreux détachement de légionnaires. À leur approche, les citoyens se retirèrent dans l’église avec la résolution ou de défendre par les armes cet édifice sacré, ou de s’ensevelir sous ses ruines. Ils rejetèrent avec indignation l’avis et la permission qu’on leur donna de se retirer. Enfin les soldats, irrités d’un refus si opiniâtre, mirent le feu de tous côtés au bâtiment ; et un grand nombre de Phrygiens[1], consumés avec leurs femmes et leurs enfans, perdirent la vie dans cette espèce extraordinaire de martyre[2].

    Ils faisaient un inventaire très-exact des vases, etc., qu’ils y trouvaient. Celui de l’église de Cirta, en Numidie, existe encore. Les effets qui y sont contenus sont deux calices d’or et six d’argent ; six urnes, un vase, sept lampes, le tout aussi d’argent ; outre une grande quantité d’habits, et beaucoup d’ustensiles de cuivre.

  1. Tous les habitans, et non pas seulement un grand nombre d’entre eux, furent brûlés, dit Eusèbe. Lactance confirme cette circonstance, universum populum. (Note de l’Éditeur.)
  2. Lactance (Inst. div., V, II) ne parle que de la ruine