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personnes distinguées par les emplois qu’elles avaient occupés ou par la faveur dont elles avaient joui, furent jetées en prison. On employa toute sorte de tourmens ; et la cour, aussi-bien que la ville, fut souillée de plusieurs exécutions sanglantes[1]. Mais comme il ne fut pas possible d’arracher aucun éclaircissement sur ce complot ténébreux, il paraît que nous devons ou présumer les chrétiens innocens, ou admirer leur fermeté. Peu de jours après, Galère sortit avec précipitation de Nicomédie, déclarant que s’il différait plus long-temps de quitter un lieu si funeste, il tomberait bientôt victime de la rage des chrétiens. Les historiens ecclésiastiques, par qui seuls nous connaissons cette persécution, et qui ne nous en ont laissé que des notions imparfaites et pleines de partialité, ne savent comment expliquer les craintes et le danger des empereurs. Deux de ces écrivains, un prince et un rhéteur, avaient été témoins de l’incendie de Nicomédie : l’un l’attribue à la foudre et à la colère divine[2] ; l’autre assure qu’il

  1. Lact., De mort. pers., c. 13, 14. Potentissimi quondam eunuchi necati, per quos palatium et ipse constabat. Eusèbe (l. VIII, c. 6) parle des cruelles exécutions des eunuques Gorgonius et Dorothée, et d’Anthimius, évêque de Nicomédie. Ces deux écrivains décrivent d’une manière vague, mais tragique, les scènes horribles qui se passèrent en présence même des empereurs.
  2. Voyez Lactance, Eusèbe et Constantin, ad cœtum sanctorum, c. 25. Eusèbe avoue qu’il ignore la cause de l’incendie.