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d’un magistrat civil[1] qu’à l’humilité d’un évêque de la primitive Église. Quand il haranguait le peuple du haut de la chaire de vérité, il affectait le style figuré et les gestes peu naturels d’un sophiste de l’Asie, pendant que les voûtes de la cathédrale retentissaient des acclamations les plus extravagantes à la louange de sa divine éloquence. Arrogant, rigide, inexorable envers ceux qui résistaient à son pouvoir, ou qui refusaient de flatter sa vanité, le prélat d’Antioche relâchait la discipline de l’Église en faveur de son clergé, et il lui en prodiguait les trésors. Les prêtres qui lui étaient soumis avaient la liberté, à l’imitation de leur chef, de satisfaire tous leurs appétits sensuels ; car Paul se livrait, sans scrupule, aux plaisirs de la table, et il avait reçu dans le palais épiscopal deux jeunes femmes d’une grande beauté, qui lui servaient ordinairement de compagnes dans ses momens de loisir[2].

  1. La simonie n’était point inconnue dans ce siècle ; et le clergé achetait quelquefois ce qu’il avait intention de vendre. Il paraît qu’une riche matrone, nommée Lucilla, fit l’acquisition de l’évêché de Carthage, pour Majorin, un de ses serviteurs. Le prix fut de quatre cents folles (Monum. antiquit. ad calcem optati, p. 263). Chaque follis contenait cent vingt-cinq pièces d’argent ; et toute la somme pouvait valoir deux mille quatre cents livres sterl.
  2. Si l’on voulait diminuer les vices de Paul, il faudrait supposer que les évêques assemblés de l’Orient remplirent des plus coupables calomnies les lettres circulaires qu’ils adressèrent à toutes les Églises de l’empire (Ap. Eusèb., l. VII, c. 30.)