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la faute de cette dissimulation profane[1]. Dans toutes les persécutions, il y eut un grand nombre d’indignes chrétiens qui désavouèrent ou abandonnèrent publiquement leur religion, et qui confirmèrent la sincérité de leur abjuration par quelque acte légal, soit en brûlant de l’encens, soit en offrant des sacrifices. Parmi ces apostats, les uns avaient cédé à la première menace ou à la première exhortation des magistrats. La patience des autres n’avait pu être subjuguée que par la lenteur et par le redoublement des supplices. Ceux-ci ne s’avançaient qu’en tremblant ; l’épouvante peinte dans leurs regards décelait leurs remords intérieurs, tandis que ceux-là marchaient avec confiance et avec joie aux autels des dieux[2]. Mais le déguisement, que la crainte avait

    aux idoles ; elle durait plusieurs années. Voyez Fleury, Hist. ecclésiast., t. II, p. 171. (Note de l’Éditeur.)

  1. Le commentaire étendu de Mosheim (483-489) donne les éclaircissemens les plus précis sur les libellatici, qui sont principalement connus par les écrits de saint Cyprien.
  2. Pline, lett. X, 97 ; saint Denys d’Alexandrie, ap. Euseb., l. VI, c. 41. Ad prima statim verba minantis inimici maximus fratrum numerus fidem suam prodidit : nec prostratus est persecutionis impetu, sed voluntario lapsu se ipsum prostravit. (Œuvres de saint Cyprien, p. 89.) Parmi les déserteurs il y avait plusieurs prêtres et même des évêques (*).
    (*) Pline dit que la plupart des chrétiens persistèrent à s’avouer tels ; c’est même la raison qui lui fait consulter Trajan (periclitantium numerus). Eusèbe (l. VI, c. 41) ne nous permet pas de douter que le nombre de ceux qui renoncèrent à leur foi ne fût infiniment au--