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des hommes de tout état, soit dans l’Italie, soit dans les provinces. Cette ignorance dont il parle peut donc nous donner des éclaircissemens utiles. Nous ne craindrons pas d’avancer que, lorsqu’il accepta le gouvernement de la Bithynie, il ne se trouvait aucune loi générale, aucun décret porté par le sénat qui fût alors en vigueur contre les chrétiens ; que ni Trajan, ni aucun de ses prédécesseurs vertueux, dont les édits avaient été reçus dans la jurisprudence civile et criminelle, n’avaient déclaré publiquement leurs intentions au sujet de la nouvelle secte ; et que, quelles que pussent être les mesures employées précédemment contre les chrétiens, il n’y avait point encore eu de décision assez respectable ni assez authentique pour servir de modèle à un magistrat romain.

Trajan et ses successeurs établissent une forme légale de procédure contre les chrétiens.

La réponse de Trajan, à laquelle, dans les siècles suivans, les chrétiens en ont souvent appelé, renferme tous les égards pour la justice et pour l’humanité, qui pouvaient se concilier avec les notions erronées que suivait ce prince en matière de police religieuse[1]. Au lieu de déployer le zèle implacable d’un inquisiteur avide de découvrir les plus légères traces de l’hérésie, et se glorifiant dans le nombre

  1. Pline, lett. X, 98 ; Tertullien (Apolog., c. 5) regarde ce rescrit comme un adoucissement des anciennes lois pénales : Quas Trajanus ex parte frustratus est ; et cependant Tertullien, dans un autre endroit de son apologétique, montre l’inconséquence qu’il y avait à défendre les recherches et à prescrire des punitions.