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lorsqu’il excite à la fois les craintes et l’humanité du proconsul d’Afrique, en l’assurant que s’il persiste dans ses cruelles intentions, il doit décimer Carthage ; qu’il trouvera parmi les coupables plusieurs personnes de son rang, des sénateurs et des dames de la plus noble extraction, et qu’il sera forcé de punir les amis et les parens de ses amis les plus intimes[1]. Il paraît cependant qu’environ quarante ans après, l’empereur Valérien ne doutait pas de la vérité d’une pareille assertion, puisque, dans un de ses rescrits, il suppose évidemment que des sénateurs, des chevaliers romains et des femmes de qualité étaient entrés dans la secte des chrétiens[2]. L’Église continua toujours à augmenter sa grandeur extérieure, à mesure qu’elle perdait de sa pureté intérieure ; et sous le règne de Dioclétien, le palais, les tribunaux, l’armée même recelaient une multitude de chrétiens, qui s’efforçaient de concilier les intérêts du monde présent avec ceux d’une vie future.

Le christianisme très-favorablement reçu par les pauvres et par les simples.

Cependant ces exceptions sont en trop petit nombre, elles ont eu lieu dans des temps trop éloignés de la naissance du christianisme pour détruire entièrement l’imputation d’ignorance et d’obscurité que l’on a jetée avec tant d’arrogance sur les premiers fidèles[3]. Au lieu de faire servir à notre dé-

  1. Tertullien, ad Scapulam. Cependant, même dans ses figures de rhétorique, il se borne à un dixième de Carthage.
  2. Saint Cyprien, Epist. 79.
  3. Cette énumération incomplète doit être augmentée