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ressemblance, décèlent le pinceau d’un ennemi. Lorsque l’humble foi de Jésus-Christ se répandit dans le monde, elle fut embrassée par plusieurs personnes qui jouissaient de la considération attachée aux talens ou aux richesses. Aristide, qui adressa une apologie éloquente à l’empereur Adrien, était un philosophe d’Athènes[1]. Saint Justin martyr avait cherché la vérité dans les écoles de Zénon, d’Aristote, de Pythagore et de Platon, avant le moment heureux où il fut abordé par le vieillard, ou plutôt par l’ange, qui tourna tout à coup son attention vers l’étude des prophéties des Juifs[2]. Saint Clément d’Alexandrie était très-versé dans la connaissance de la langue grecque, et Tertullien dans celle de la langue latine. Jules-Africain et Origène avaient embrassé presque toutes les sciences connues de leur temps ; et quoique le style de saint Cyprien soit très-différent de celui de Lactance, on croit s’apercevoir que ces deux écrivains avaient enseigné publiquement la rhétorique. L’étude même de la philosophie s’introduisit enfin parmi les chrétiens ; mais elle ne produisit pas toujours les effets les plus salutaires ; et les lettres enfantèrent aussi souvent l’hérésie que la dévotion. Ce que l’on disait des sectateurs d’Artémon peut s’appliquer, avec une égale justesse, aux

  1. Eusèbe, Hist. ecclésiast., IV, 3 ; saint Jérôme, Ep. 83.
  2. L’histoire est agréablement contée dans les dialogues de saint Justin. Tillemont (Mém. ecclésiast., l. II, p. 334), qui la rapporte d’après lui, est sûr que le vieillard était un ange déguisé.