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rent à tempérer la sévérité des lois ; et avant la fin du troisième siècle, plusieurs terres considérables avaient passé aux Églises opulentes de Rome, de Milan, de Carthage, d’Antioche, d’Alexandrie, et des autres grandes villes de l’Italie et des provinces.

Distribution du revenu.

L’évêque était l’intendant naturel de l’Église : il disposait du trésor public à sa volonté et sans être obligé de rendre compte. Ne laissant aux prêtres que leurs fonctions spirituelles, il confiait seulement à l’ordre plus subordonné des diacres la direction et la distribution du revenu ecclésiastique[1]. Si nous pouvons ajouter foi aux déclamations véhémentes de saint Cyprien, l’Afrique ne renfermait qu’un trop grand nombre de prélats qui, dans l’exercice de leurs fonctions, violaient non-seulement tous les préceptes de la perfection évangélique, mais encore ceux de la morale. Quelques-uns de ces intendans infidèles dissipaient les richesses de l’Église pour satisfaire à leurs plaisirs sensuels ; d’autres les faisaient indignement servir à leur profit particulier, à des marchés frauduleux, et à des usures exorbitantes[2]. Mais tant que les contributions du peuple chrétien furent libres et volontaires, l’abus de leur confiance ne pouvait être bien fréquent ; les usages auxquels on consacrait généralement leur libéralité, honoraient la société religieuse. L’évêque et son clergé avaient

  1. Constitut. apostol., II, 35.
  2. Saint Cyprien, De lapsis, p. 89 ; Epistol., 65. L’accusation est confirmée par le dix-neuvième et par le vingtième canon du concile d’Elvire.