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II. Les lois de Constantin contre le rapt marquent bien peu d’indulgence pour une des faiblesses les plus pardonnables de la nature humaine, puisqu’elles regardaient comme ravisseur, et punissaient comme tel tout homme qui enlevait de la maison de ses parens une fille âgée de moins de vingt-cinq ans ; soit qu’il eût employé la violence, ou que par une douce séduction il l’eût déterminée à une fuite volontaire, le ravisseur était puni de mort ; et si la mort simple ne se trouvait pas proportionnée à l’énormité de son crime, il était ou brûlé vif ou déchiré en pièces par les bêtes sauvages au milieu de l’amphithéâtre. Si la jeune fille déclarait avoir été enlevée de son propre consentement, loin de sauver son amant par cet aveu, elle s’exposait à partager son sort. Les parens de la fille infortunée ou coupable étaient obligés de poursuivre en justice le ravisseur : si, cédant aux mouvemens de la nature, ils fermaient les yeux sur l’insulte, et réparaient par un mariage l’honneur de leur famille, ils étaient eux-mêmes condamnés à l’exil, et leurs biens confisqués. Les esclaves de l’un ou de l’autre sexe, convaincus d’avoir favorisé le rapt ou la séduction, étaient brûlés vifs, ou mis à mort par un supplice plus raffiné, qui consistait à leur verser dans la bouche du plomb fondu. Comme le crime était un crime public, l’accusation en était permise même aux étrangers. Quel que fût le nombre des années écoulées depuis le crime, l’accusation était toujours recevable ; et les suites de la sentence s’é-