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dant, Dioclétien parut encore une fois en public le premier mars ; mais si pâle et si exténué, que ceux avec lesquels il avait vécu le plus familièrement auraient eu de la peine à le reconnaître. [Sa prudence.]Il était temps de finir le combat pénible qu’il avait soutenu pendant plus d’une année pour accorder le soin de sa conservation avec les devoirs de son rang. Sa santé exigeait qu’il suspendît ses travaux ; sa dignité lui imposait la loi de veiller du sein de la maladie à l’administration d’un grand empire. Il résolut de finir ses jours dans un repos honorable, de placer sa gloire hors de la portée des traits de la fortune, et de laisser le théâtre du monde à des princes plus jeunes et plus actifs[1].

A. D. 305. 1er mai.

La cérémonie de son abdication eut lieu dans une grande plaine, à trois milles environ de Nicomédie, où s’étaient assemblés les soldats et le peuple. L’empereur, monté sur un tribunal élevé, leur déclara son intention dans un discours rempli de raison et de noblesse. Dès qu’il eut ôté le manteau de pourpre, il se déroba aux regards de la multitude frappée d’étonnement ; et, traversant la ville dans un chariot couvert, il prit aussitôt la route de Salone, sa patrie, qu’il avait choisie pour sa retraite. Le même

  1. Cette abdication, qui a été si diversement interprétée, est attribuée par Aurel.-Victor à deux causes, dont la première est le mépris de Dioclétien pour l’ambition ; la seconde, son appréhension des troubles qui menaçaient l’état. Un des panégyristes (VI, 9) parle de l’âge et des infirmités de Dioclétien comme de la cause naturelle de sa retraite.