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cuirasse à mettre, avant d’être en état de combattre[1]. » L’impétuosité de Galère porta le désordre et le découragement parmi les Barbares. Une faible résistance fut suivie d’un horrible carnage. Au milieu de la confusion générale, le monarque blessé (car Narsès commandait ses armées en personne) prit la fuite vers les déserts de la Médie. Le vainqueur trouva des richesses immenses dans la tente magnifique de ce prince et dans celles de ses satrapes. On rapporte un trait curieux de l’ignorance rustique mais martiale des légions, qui prouve combien elles connaissaient peu les élégantes superfluités de la vie. Une bourse faite d’une peau luisante, et remplie de perles, tomba entre les mains d’un simple soldat. Il garda soigneusement la bourse, mais il jeta ce qu’elle contenait, jugeant que ce qui ne servait à aucun usage ne pouvait être d’aucun prix[2]. [Et sa conduite envers les prisonniers de la famille de Narsès.]La perte principale de Narsès était d’une nature infiniment plus sensible. Plusieurs de ses femmes, ses sœurs, ses enfans, qui accompagnaient l’armée, avaient été pris dans la déroute. Mais quoique le caractère de Galère eût en général peu de rapport avec celui d’Alexandre, le César, après sa victoire, imita la belle conduite du héros macédonien envers la famille de Darius. Les femmes et les enfans de Narsès

  1. Xénophon, Retraite des dix mille, l. III. C’est pour cette raison que la cavalerie persane campait à soixante stades de l’ennemi.
  2. Ce trait est rapporté par Ammien, l. XXII. Au lieu de saccum, quelques-uns lisent scutum.