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l’espoir d’une nouvelle récolte. La famine est presque toujours accompagnée de maladies épidémiques, effet ordinaire d’une nourriture peu abondante et malsaine. D’autres causes doivent cependant avoir contribué à cette peste cruelle, qui depuis 250 jusqu’en 265, ravagea sans interruption toutes les provinces, toutes les villes et presque toutes les familles de l’Empire romain. Pendant quelque temps on vit mourir à Rome cinq mille personnes par jour, et plusieurs villes qui avaient échappé aux mains des Barbares, furent entièrement dépeuplées[1].

Diminution de l’espèce humaine.

Il nous est parvenu une circonstance très-curieuse, qui n’est peut-être pas inutile à remarquer dans le triste calcul des calamités humaines. On conservait dans la ville d’Alexandrie un registre exact des citoyens qui avaient droit à une distribution de blé. On trouva que sous le règne de Gallien, le nombre des individus de quatorze à quatre-vingts ans qui avaient part à cette rétribution, ne s’élevait pas au-dessus de celui des hommes de quarante à soixante-dix-ans qui la recevaient dans des temps antérieurs[2]. Ce fait authentique, en y appliquant les meilleures tables de mortalité, prouve évidem-

  1. Hist. Aug., p. 177 ; Zosime, l. I, p. 24 ; Zonare, l. XII, p. 623 ; Eusèbe, Chronicon ; Victor, in Epitom. ; Victor, in Cæsar. ; Eutrope, IX, 5 ; Orose, VII, 21.
  2. Eusèbe, Hist. ecclés., VII, 21. Le fait est tiré des lettres de Denis, qui, dans le temps de ces troubles, était évêque d’Alexandrie.