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de paysans et d’esclaves y régna pendant quelque temps, et rappela le souvenir de ces guerres honteuses que Rome avait eu à soutenir dans ses plus beaux jours[1]. Les dévastations dont le laboureur était victime ou complice, ruinaient l’agriculture en Sicile ; et comme les principales terres appartenaient à de riches sénateurs, dont une des fermes comprenait souvent tout le territoire d’une ancienne république, ces troubles affectèrent peut-être la capitale de l’empire plus vivement que toutes les conquêtes des Goths et des Perses.

Tumulte d’Alexandrie.

II. La fondation d’Alexandrie, projet noble, conçu et exécuté par le fils de Philippe, était un monument de son génie. Bâtie sur un plan magnifique et régulier, cette grande ville, qui ne le cédait qu’à Rome elle-même, avait quinze milles de circonférence[2]. On y comptait trois cent mille habitans libres, outre un nombre au moins égal d’esclaves[3]. Son port servait d’entrepôt aux riches marchandises de l’Arabie et de l’Inde, qui affluaient dans la capitale et dans les provinces de l’empire. L’oisiveté y était inconnue ; les différentes manufactures de verre, de lin et de papyrus employaient une quantité prodigieuse de bras. Hommes, femmes, vieil-

  1. L’Hist. Auguste, p. 177, l’appelle servile bellum. Voy. Diodore de Sicile, l. XXXIV.
  2. Pline, Hist. nat., V, 10.
  3. Diodore de Sicile, l. XVII, p. 590, édition de Wesseling.