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Les Allemands envahissent la Gaule et l’Italie.

Ces fiers Germains, étonnés d’abord des préparatifs immenses d’Alexandre Sévère, tremblèrent devant son successeur, barbare qui les égalait en courage et en férocité ; mais, toujours prêts à fondre sur les frontières de l’empire, ils augmentèrent le désordre général qui le déchira après la mort de Dèce. Les riches provinces de la Gaule éprouvèrent leur fureur, et ce peuple arracha le premier le voile qui dérobait à l’univers la faible majesté de l’Italie. Un nombreux corps d’Allemands traversa le Danube, pénétra par les Alpes rhétiennes dans les plaines de la Lombardie, s’avança jusqu’à Ravenne, et déploya ses étendards victorieux presqu’à la vue de la capitale[1]. Cette insulte et le danger de l’état rallumèrent dans l’esprit des sénateurs quelque étincelle de leur ancienne vertu. Les empereurs se trouvaient alors engagés dans des guerres très-éloignées ; Valérien en Orient, et Gallien sur les bords du Rhin : toutes les espérances, toutes les ressources des Romains étaient en eux-mêmes. [Ils sont repoussés de devant Rome par le sénat et par le peuple.]Dans cette extrémité, le sénat prit la défense de la république ; il mit en ordre de bataille les gardes prétoriennes qui avaient été laissées dans la ville ; et, pour compléter leur nombre, il enrôla les plus forts et les plus zélés des plébéiens. Les Allemands, surpris de voir tout à coup une armée plus nombreuse que la leur, repassèrent en Germanie chargés de butin ;

  1. Hist. Aug., p. 215, 216 ; Dexippus, Excerpta legationum, p. 8 ; saint Jérôme, Chron. ; Orose, VII, 22.