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recueillit le fruit. À la vérité, la guerre civile porta ce sage citoyen sur le trône ; mais il en monta les degrés avec une innocence rare dans ce siècle de révolutions, puisqu’il ne devait ni reconnaissance ni fidélité au souverain dont il prenait la place.

Caractère de Valérien.

Valérien avait environ soixante ans[1] lorsqu’il commença son règne. Ce ne furent ni le caprice de la populace ni les clameurs de l’armée qui lui mirent la couronne sur la tête ; il semblait obéir à la voix unanime de l’univers romain. Dans la carrière des honneurs qu’il avait successivement obtenus, il avait mérité la faveur des princes vertueux, et s’était montré l’ennemi des tyrans[2]. La noblesse de son extraction, la douceur et la pureté de ses mœurs, l’étendue de ses connaissances et la grande expérience qu’il avait acquise, lui attiraient la vénération du sénat et du peuple. Si le genre humain, selon la remarque d’un ancien auteur, eût été libre de se donner un maître, son choix serait tombé sur Valérien[3]. Peut-être le mérite de cet empereur ne

    Eutrope, en parlant de sa mort, ne dit point qu’il fut assassiné. (Note de l’Éditeur.)

  1. Il avait environ soixante-dix ans lorsqu’il fut pris par les Perses, ou, comme il est plus probable, lorsqu’il mourut. (Hist. Aug., p. 173 ; Tillem., Hist. des Emp., t. III, p. 893, n. I.)
  2. Inimicus tyrannorum, Hist. Aug., p. 173. Dans la lutte glorieuse du sénat contre Maximin, Valérien se montra de la manière la plus courageuse. (Hist. Aug., p. 156.)
  3. Selon la distinction de Victor, il paraît que Valérien